Cet article constitue le premier service presse du blog. Que de nouveautés ces derniers temps… J’ai répondu à l’annonce de la romancière via instagram, tel un défi lancé avec le même principe directeur, trouver des inspirations rôlistes à une œuvre.

Edité chez Nanachi, maison d’édition indépendante, ce roman d’héroic-fantasy, Vertemuraillle, signé Jennifer Tellier, est le premier tome d’une trilogie au titre d’Elijah. Cet opus a été édité en décembre 2019. Le tome 3, l’île aux ours, a été publié en novembre 2020.
Pas évident de se lancer dans un service presse, surtout lorsqu’il est proposé par l’auteure. J’avoue que je me suis inutilement mis une certaine pression. Dans cette posture, j’ai eu du mal avec le 1er chapitre, le personnage principal ne m’intéressait pas trop, je ne me retrouvais pas trop dans la narration. Puis, dès le chapitre suivant, toute cela était oublié, l’auteure semblait prendre ses aises, l’histoire prenait un tour inattendu, en même temps que j’appréciais la lecture sans me soucier d’autre chose. J’ai lu facilement la suite et l’ai réellement apprécié, désireux d’en savoir plus sur l’objectif réel des héros, sur cette magie étrange, sur les relations parfois équivoques des personnages et leurs dangereuses pérégrinations.
Dans ce livre, Elijah, un ménestrel, en apparence insouciant et coureur, exerce ses talents de musicien dans l’auberge de son oncle et sa tante mais voit ses quelques certitudes s’envoler lorsqu’une attaque armée vient détruire son paisible village. De la fuite avec son frère et quelques amis, en passant par les retrouvailles avec de vieilles connaissances qui s’avèrent être mages, jusqu’à une nouvelle quête truffée d’embûches qui devient initiatique pour un Elijah se découvrant des capacités hors norme, l’aventure prend le dessus.
Petite réserve : j’ai eu l’impression que la rencontre des compagnons d’infortune et de magie était un peu facile d’autant que les trois héros se connaissent déjà, qu’il sont dotés tous trois de capacités surnaturelles. Mais le fait qu’ils soient également d’une grâce peu commune m’a finalement ramené à l’idée que rien de tout cela ne devait être fortuit…
Le héros, rapidement introduit dans ce cercle où la magie perdure alors qu’on la pensait oubliée et proscrite, apparaît finalement comme tourmenté, en proie à des sentiments contradictoires. J’admets ne pas être habitué à ce regard appuyé sur les sentiments, les émotions profondes des protagonistes, néanmoins cela m’a rendu l’interprète principal attachant. Cette grande sensibilité alliée à la grande accessibilité du roman en font une belle entrée en matière dans l’univers de la Fantasy. Et on a envie de savoir la suite, signe que le roman a réussi à m’accrocher et me plaire.
Les inspirations rôlistes distillées dans le roman, de la quête initiatique jusqu’aux secrets du monde
Mais vous allez me dire, et les inspirations pour les jeux de rôle (JDR) dans tout çà ?
La question n’appelle pas une réponse si évidente au premier abord. S’il est vrai que le roman est très axé sur Elijah, il n’empêche que son aventure devient rapidement associée aux autres personnes qui l’accompagnent, des premiers compagnons d’infortune, jusqu’aux mages, Zach et Tess, qui vont le mener vers Vertemuraille.
La notion de quête, d’objectif commun au cœur du récit, peut faire du scénario dessiné ici une aventure clé en main.
Je trouve que le début est assez bien trouvé pour déstabiliser des joueurs. Ce sont parfois ces types d’histoires qui finissent en campagnes épiques.
Pour être plus clair, une fête de village interrompue par une attaque brutale et sanguinaire constitue un démarrage surprenant et efficace, cela crée déjà un objectif premier, voire primaire, la fuite, puis vient la survie, en pleine forêt avec le manque de vivre et les conséquences sur les actions et interactions au sein de l’équipe (ce que le roman décrit bien). Je vous conseille, de temps en temps, de surprendre vos joueurs avec un début sur le fil du rasoir, pour faire presque tomber le mythe de la taverne, endroit rêvé et fantasmé pour trouver un riche employeur.
Ensuite, on pourrait coller à la trame de l’auteure car les aventures suivantes, les rencontres, plus ou moins étonnantes voire même effrayantes vont à n’en pas douter donner le change. J’aimerais en dire plus sur le sujet mais ce serait dévoiler trop grandement la trame, je pourrais seulement ajouter que les visions d’un des mages vont contribuer à les faire avancer dans des chemins extrêmement dangereux…
Autre idée à exploiter, les pouvoirs magiques spécifiques associés à des types de pierre, ce qui, sans être fondamentalement original, constitue une idée intéressante, et j’espère que les opus suivants délivreront quelques informations supplémentaires sur ces puissances minérales.
Que les personnages soient ici dotés de facultés différentes rend l’équipe complémentaire, et cela me semble effectivement opportun pour rendre une partie équilibrée, même si notre cher Elijah semble être pourvu de capacités hors normes, qu’il apprend doucement à contrôler. D’un coté, je me dis que cela pourrait constituer un piège à éviter dans un scénario de JDR. Équilibrer le niveau des personnages joueurs (PJ) qui débutent ensemble est souvent le gage d’une absence de sentiments d’injustices, parfois préjudiciables au bon déroulé d’une partie. Dans le même temps, cette magie est puissante et a donc des conséquences, pour les autres mais aussi pour le lanceur de sorts, épuisé par l’utilisation de cette énergie surnaturelle. Cela peut venir contrebalancer ce nécessaire équilibrage pour une partie. C’est là encore assez classique mais plutôt bien exploité, le pouvoir, à défaut d’entraîner de grandes responsabilités, a des effets puissants et indésirables .
Enfin, j’aime l’idée développée dans cet univers d’un retour ou d’une survivance d’une magie, longtemps oubliée et presque interdite. J’ai tendance à imaginer dans mes scénarios ce genre d’éléments prodigieux comme rares, surement bercé par les chroniques d’un certain Luke sur une galaxie lointaine, si bien que je me retrouve dans cette manière d’en envisager les contours. C’est également un mystère captivant, on pressent des secrets qui dépassent les enjeux des protagonistes ; c’est un ressort qui fonctionne bien dans Vertemuraille comme autour d’une table de JDR. Quoi de mieux que de se sentir impliqué dans l’histoire, que d’imaginer qu’on peut avoir une influence sur l’univers, en essayant d’en percer les arcanes.
Et que dire de plus, lorsque l’on sait que l’écrivaine est elle-même rôliste, si ce n’est qu’on sort de cette lecture avec quelques idées sous le coude et des envies d’évasion ludique dans ces contrées imaginaires, pour y rencontrer, qui sait, quelques étranges sorciers aux croyances et capacités oubliées…
Je précise que les illustrations ne sont pas tirées du roman, mais je les ai trouvées adaptées pour parfaire ma chronique. Mention spéciale à Anthony Devine.